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Emotions et intestin sont-ils liés ?

Dernière mise à jour : 21 sept. 2020


J’ai l’estomac noué... Ça me prend aux tripes... J’ai la peur au ventre. J’ai du mal à digérer ce qu'il m’a dit…

Derrière ces expressions populaires, n’y aurait-il pas une sagesse populaire qui aurait fait le lien entre nos émotions et nos intestins ?

L’Ayurveda a d’ailleurs toujours considéré l’intestin comme le siège des émotions et de Vata. Vata est le principe du dynamisme, du rythme, des vibrations et du mouvement qui animent toute chose. Vata s’exprime dans l’organisme notamment par le mouvement des influx nerveux, de la respiration, des processus digestifs et par la locomotion en général.

Du coup la question que je me pose :

Est-ce que nos émotions influent sur nos intestins ? Ou bien l’état de notre flore influe sur nos émotions ? Ou bien les deux sont-elles liées ?

100 millions de neurones

La présence de neurones dans la paroi intestinale a été mise en évidence par des études scientifiques. Elles forment un système appelé "système nerveux entérique" qui fonctionne comme un mini-cerveau qui produit une grande quantité d'hormones régulant notre humeur et notre appétit.

Le cerveau est connecté directement à l'intestin par l'intermédiaire du nerf vague. Ce dernier connecte plus de 100 millions de neurones du système nerveux entérique jusqu'au cerveau.

Quand la nourriture arrive dans l'estomac, certaines hormones venant de l'intestin sont secrétées et activent une zone de passage allant de l'estomac vers le cerveau et l'hypothalamus pour freiner la consommation de nourriture. Il s'agit par exemple d'hormones supprimant l'appétit, appelées "peptide YY".

Des neurotransmetteurs

Notre organisme y produit également de nombreux neurotransmetteurs, indispensables à la manifestation des émotions et à la mémoire (sérotonine, acétylcholine, noradrénaline, GABA…).

Environ 80 % de la sérotonine qui se trouve dans notre corps (la sérotonine est l'hormone de la bonne humeur) est produite dans l’intestin. D’où l’importance de bichonner notre flore.

Il semble donc qu’en agissant sur l’intestin, il soit possible d’agir sur le fonctionnement du cerveau, et donc sur l’humeur.

100 000 milliards de bactéries

La microflore intestinale renferme environ 100 000 milliards de bactéries appartenant à plus de 400 espèces différentes, dont l’activité se traduit par la production d’enzymes et de metabolites (Ce sont des composés stables issus de la transformation biochimique d'une molécule initiale par le métabolisme).

Ces bactéries contribuent à la conversion des aliments en nutriments et en énergie, de même qu'à la synthèse de vitamines indispensables à l'organisme. Elles participent également au bon fonctionnement du système immunitaire.

La microflore intestinale n’est pas séparée de l’hôte (c’est à dire nous, notre corps) ni des aliments que nous ingérons.

L’ensemble constitue un écosystème aux interractions multiples. Toute modification d’une partie de ses constituants est susceptible de perturber l’équilibre et le fonctionnement de cet écosystème.

Une battaille pour la survie

Chaque espèce de bactéries a ses préférences alimentaires et son métabolisme propre. Ainsi certaines vont se nourrir de certains sucres, d’autres plutôt de protéines.

Et comme toute espèce qui se respecte, elles luttent pour s’approprier leur territoire, c'est à dire l’intestin. C’est une question de survie de l’espèce.

Elles envoient alors des signaux au cerveau pour nous inciter à manger leur nourriture préférée, celle qui va leur permettre de prendre le dessus sur leurs concurrentes.

Les molécules libérées par les bactéries vont pouvoir agir sur le cerveau comme une récompense en nous faisant nous "sentir bien " quand on mange ce qui leur convient ou comme une punition en créant un malaise ou un changement d’appréciation du goût quand on mange ce qui ne leur convient pas.

Les bactéries contrôlent-elles nos envies et nos humeurs ?

Par les mêmes mécanismes les bactéries peuvent agir sur notre humeur.

Si le lien entre flore intestinale et troubles de la nutrition est assez bien établi, l’effet du microbiote sur le comportement et l’humeur est un champ d’investigations plus récent. Plusieurs études chez l’animal ont montré une corrélation entre des déséquilibres du microbiote et des symptômes proches de ceux observés dans des maladies neuropsychiatriques.

Des troubles neuropsychiatriques comme l’autisme et l’anxiété semblent influencés par la flore intestinale chez la souris. Des recherches sont en cours chez l’humain.

Des états anxieux par exemple peuvent être calmés par l’absorption des certains probiotiques.

Les probiotiques sont des souches sélectionnées de microorganismes vivants qui nous sont bénéfiques et qu’on rajoute dans des yaourts par exemple ou dans les gélules sous forme de complément. Néanmoins il est important de ne pas faire n’importe quoi en prenant n'importe quel supplément pas forcément adapté et de veiller d’abord à un rétablissement de la flore.

Ces bactéries sont également très sensibles au stress.

Lorsqu’on est en situation de stress, certains composés chimiques qui sont produits dans l’intestin modifient la flore intestinale et perturbent la production des neurotransmetteurs dont on a parlé plus haut, qui soutiennent l’humeur.

Le Dr Devroede, s'est intéressé sur les liens entre le physique et le psychique. Pour ce médecin, le ventre représente la mémoire de notre vie émotionnelle. Il désigne par"mots de ventre", les émotions refoulées, dont la manifestation physique peut-être une douleur abdominale lors d’un moment de grand stress ou de trouble émotionnel.

Et le plexus solaire dans tout ça ?

Le plexus solaire est d'abord un centre (ou plexus) nerveux, c'est à dire la concentration localisée d'un ensemble de nerfs qui innervent les organes de l'abdomen (estomac, foie, rate). Ces nerfs appartiennent au système nerveux sympathique (système activé en cas de stress) dont l'un des plus connu est le nerf pneumogastrique (ou nerf vague, évoqué plus haut) impliqué dans les malaises vagaux. Sa fonction est de contrôler et réguler les fonctions digestives d'absorption des aliments comme celle de nos pensées. On le localise approximativement à égale distance entre la pointe du sternum et le nombril

Un blocage à ce niveau peut donc entraîner des troubles intestinaux.

AMA

L’intestin évacue les restes de l’alimentation que votre corps ne peut digérer, mais il a aussi pour fonction d’évacuer les reste des hormones des émotions : sérotonine, acétylcholine, noradrénaline, GABA.

Nous contractons aussi nos intestins lorsque nous sommes en état de stress ou lorsque nous ressentons d’autres types d’émotions. A l’opposé, lorsque nous nous relaxons, nous relâchons nos intestins et le travail digestif peut commencer.

Qui n’a jamais eu mal au ventre après avoir mangé sous le coup de la contrarié ?

En Ayurveda, le terme toxine est appelé AMA.

Les toxines sont le résultat de la combinaison de la qualité des aliments que nous ingérons et de notre capacité à les digérer correctement.

Plusieurs facteurs peuvent être à l’origine de la production de AMA. La nature des aliments certes, mais également le stress physique, mental et émotionnel ont des répercussions sur l’assimilation des aliments et la production de toxines. L'Ayurveda et la naturopathie proposent plusieurs méthodes d'élimination des toxines. J'y consacrerai un article spécifique.

Alimentation et conscience

J’attache une importance capitale à la qualité de la nourriture et au rapport que nous avons avec les aliments et nos repas ; dans la façon dont les aliments ont été cultivés, récoltés, préparés et ingérés.

L’action de manger est en fin de compte une communion entre l’intelligence de la nature et l’intelligence humaine par le biais des sens et de la conscience.

Idéalement, la nourriture devrait être cultivée consciemment, récoltée à maturité, préparée dans une atmosphère harmonieuse et mangée avec conscience.

Cette notion se résume par le terme Sattva en Ayurveda. Sattva est un état de paix intérieure qui nous permettent d'agir de manière plus juste. Sous l’effet du stress, le cerveau ne retient que certains aliments de confort en tant que modulateurs émotionnels, nous réduisant à des "mangeurs émotionnels".

L’état naturel de paix et de calme, vont permettre une meilleure assimilation et une meilleure digestion des nutriments.

C’est pourquoi l’Ayurvéda insiste tant sur l’importance de cultiver sattva dans notre vie.

Stress et sattva apparaissent donc comme antinomique. Le stress tue les bonnes bactéries de l’intestin alors qu’un mode de vie sattvique tend à les favoriser. Bonnes ou mauvaises, elles régissent nos humeurs. C’est pourquoi l’Ayurvéda rappelle que se détacher des émotions pendant le repas, ou différer son repas le temps que l'émotion soit libérée est essentiel.

Nous sommes ce que nous mangeons, mais aussi ce que nous écoutons, ce que voyons, ce que nous sentons et ce que nous touchons. C’est pourquoi, et toujours afin d’augmenter Sattva, il est recommandé d’éviter la télévision, la radio ou des musiques excitantes, au profit de musiques douces, de longs moments de silence, et de s’alimenter dans le calme et en conscience de ce que nous ingérons.

COMMENT BICHONNER NOTRE FLORE INTESTINALE ?

Privilégier l’accouchement naturel

Pendant la vie in utero, l’embryon puis le fœtus sont stériles. Si l’accouchement a lieu par voie basse, le nouveau-né va acquérir une flore proche de celle de sa mère lors de son passage par voie utéro-vaginale, alors qu’un accouchement par césarienne ne va pas rendre possibe l’acquisition d’une flore identique.

Priviliégier l'allaitement

Au-delà du fait que le lait maternel est l’aliment adapté du nouveau-né, l’allaitement va permettre à la fois la transmission d’une flore maternelle (probiotique) présente dans le lait et de nutriments spécifiques utilisés comme substrats énergétiques (glucides, lipides, protéines).

Attention aux antibiotiques

Les antibiotiques luttent contre les mauvaises bactéries et ont leur utilité en cas d'infections bactériennes, même si les remèdes naturels ont prouvé leurs effets.

Les antibiotiques agissent largement sur la flore microbienne intestinale.

Les mauvaises mais aussi les bonnes bactéries peuvent être touchées.

Rien de tel pour détraquer la flore. La prise de levure de bière ou de certains probiotiques est fortement recommandée en cas de prise d'antibiotiques.

Eviter les lingettes ou savon désinfectant. Privilégier un vrai savon.

Réduire le sucre blanc et sirop de glucose-fructose, les viandes, fromages

On distingue deux sortes de flores, une, dite de fermentation, qui tire son énergie des glucides, et une flore de putréfaction issue de la dégradation des protéines.

La flore de fermentation est plus présente dans la partie ascendante du côlon, tandis que la flore de putréfaction est plus présente dans la partie descendante.

Le rôle des bonnes bactéries est de maintenir la flore en équilibre, en empêchant les pathogènes de se fixer sur la paroi intestinale. De plus, elles produisent des vitamines (K, vitamines du groupe B). Et surtout cette flore intestinale joue un rôle capital dans les mécanismes de défense immunitaire.

Le déséquilibre de la flore intestinale se produit lorsque nous consommons trop d'un élément particulier.

Trop de glucides et c'est la flore de fermentation qui se développe (trop de gaz). Trop de protéines, de viandes, et c'est la flore de putréfaction qui se développe (gaz malodorants).

Tous les aliments sucrés, et même ceux qui se transforment rapidement en sucre simples (type jus de fruit), favorisent la prolifération d’une flore fongique (c'est à dire des champignons), et fragilise l’immunité .

Probiotiques

Les probiotiques (littéralement pro bio signifie en faveur de la vie) sont des bactéries, des virus ou des levures qui ont des effets bénéfiques sur notre santé. On en trouve dans les produits fermentés (yaourt et lait fermentés) mais aussi dans les glaces, les barres de céréales, le pain au levain…

Le rôle des probiotiques est de "nourrir" notre flore intestinale pour l’aider à fonctionner correctement.

Il faut privilégier les probiotiques issus de aliments comme les légumes fermentés, la choucroute, le kefir..

La prise de probiotique sous forme de suppléments est contre-indiqué en cas dysbiose (déséquilibre du microbiote intestinal) car ils aggravent ce déséquilibre. Il faut déjà rétablir la flore avant de reconsidérer la possibilité de la réensemencer avec certaines souches de probiotiques.

Prebiotiques


L’alimentation moderne est beaucoup trop pauvre en fibres, et trop riche en viandes, fromages, graisses et sucreries… Si les fibres alimentaires ne sont pas des nutriments essentiels à notre organisme, elles sont indispensables à l’entretien de notre flore intestinale qui s’en nourrit pour protéger et régénérer les intestins.

Certaines fibres stimulent de façon ciblée la croissance des "probiotiques " (les bonnes bactéries) de l’écosystème intestinal. On les appelle les "prébiotiques".

Notre flore intestinale se nourrit de fibres, il faut donc lui en apporter au quotidien par le biais des :

  • Légumineuses (ou "légumes secs ") : fèves, haricots, pois, lentilles, soja...

  • Crucifères : choux, navets, radis, roquette, cresson…

  • Fruits de saison bien mûrs

  • Céréales ancestrales pauvres en gluten : riz, millet, sarrasin, épeautre…

L’ail, l’oignon, la banane, l’asperge, l’artichaut, le poireau et le topinambour sont aussi des sources de prébiotiques.

Bien évidemment les céréales doivent être complètes ou semi-complètes et à faire tremper 12h environ avant cuisson, comme pour les légumineuses.

Préférer les légumes et fruits bio, car ils ne contiennent pas de pesticides

(cancérigènes) et de conservateurs qui affaiblissent la flore intestinale.

Mâcher suffisamment

Je ne le répèterai jamais assez. Mastiquez !

Pour imprégner les aliments de salive, notamment les aliments riches en amidon (céréales, fruits et légumes).

Une bonne mastication garantit que la première phase de la digestion ait lieu dans la bouche, sous l’effet de l’amylase de la salive (une enzyme), pour éviter une fermentation intestinale qui produirait des toxines.

Tous ces conseils restent généraux et dépendent du profil et du terraine de chacun. Une approche plus individualisée et ciblée est indispendable afin d’obtenir des résultats durables sur du long terme.

Sources

GERSHON Michael D « The second brain », ed. Harper-Perennial, NEW YORK


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